Comme nous avons pu le voir précédemment, le service administratif et financier constitue une fonction de soutien et de coordination de l’action non négligeable, voire indispensable. C’est probablement LE service le plus important, puisqu’il a en charge toute l’organisation et le fonctionnement du Mouvement. Pourtant, nous verrons que c’est souvent le plus ‘oublié’.
Afin de mieux comprendre cette situation pivot, étudions les objectifs du service :
1) Le suivi des demandes de subvention et actions
Définition
Les subventions sont des aides au financement d’immobilisations ou de déficits accordées par l’Etat, collectivités territoriales, ou autres organismes publics ; leur origine publique implique de strictes conditions d’attribution et un contrôle de leur utilisation.
- Les subventions d’exploitation contribuent à couvrir les charges normales de fonctionnement de l’association.
- Les subventions d’équilibre sont versées aux associations pour couvrir leurs charges ou déficits exceptionnels.
- Les subventions d’équipement permettent le financement d’un investissement ou le financement d’activités à long terme.
Attribution
L’attribution des aides publiques est subordonnée à un certain contrôle rigoureux, ce que les entreprises dites « classiques », a priori, ne connaissent pas, du moins à un tel niveau de suivi rapproché. Aussi, la transparence de la gestion des entreprises est d’autant plus délicate surtout dans notre contexte économique actuel dans lequel, scandales financiers, abus de biens sociaux… submergent la sphère politico-économique, pour ne pas parler d’immersion totale ! Il est vrai que les associations ont ce qu’on appelle communément ce devoir « social » et dans ce cadre, doivent rendre compte de l’utilisation des différents dons et subventions reçus. En outre, au-delà d’un simple compte rendu, il s’agit pour elles de rédiger un « rapport d’activités », comprenant aussi bien un bilan d’actions qu’un bilan financier. Ce rapport conditionne bien souvent la crédibilité de l’association. De ce fait, un tel travail au sein du monde associatif, constitue un réel travail qui, outre ce regard rétroactif que cela donne sur ses activités passées, se révèle positif pour l’évolution de son action. En revanche, si cette tâche nécessite une mobilisation accrue d’énergie, il peut nuire à l’objectif « social » de l’association. Alors après tout, pourquoi les entreprises commerciales ne devraient-elles pas en faire autant pour gagner davantage la confiance des consommateurs ?
Les associations fonctionnent donc grâce à des fonds issus de dons et de subventions. Mais, si l’on se posait la question, peut être, et j’en conviens, certes un peu saugrenue, de l’origine des fonds des entreprises et des moyens qu’elles ont pour y parvenir. Vous seriez surpris si quelqu’un en venait à tout remettre en cause, pour finalement venir vous affirmer que l’origine c’est bien vous et le temps qu’elles y mettent pour s’y consacrer ; vous, en tant que consommateurs et salariés ! En effet, nous vivons dans une société capitaliste où seul le profit nous paraît réel et vrai. A l’inverse, tout ce qui alors, vient, ou pourrait démentir cette réalité économique, est en quelque sorte mit sur le bas côté sans pour autant nier leur intérêt public et social. Pourtant, alors que les entreprises « fabriquent » de l’argent, les organisations sociales doivent, quant à elles, se battre pour pouvoir vivre et faire valoir leur existence sociale ! Est-ce cela la démocratie ? Ou bien est-ce plutôt tout simplement cela la démocratie économique américaine vers laquelle nous tendons et que pourtant nous nions ?
Suivi des subventions
Face à de telles exigences administratives de la part des financeurs, par essence nombreux, mais aussi de la part de notre société qui se veut de plus en plus concurrentielle, il devient nécessaire de structurer les moyens et méthodes de façon à éviter toute perte de temps et d’énergie qui pourrait alors avoir des conséquences non souhaitées sur la qualité ou le dépassement des échéances. Conséquences qui se révéleraient alors néfastes quant à l’attribution des subventions.
Enfin, compte tenu des délais parfois longs pour l’attribution des subventions (ou le renouvellement de subvention), la constitution d’un fond de roulement (FR), préalablement décidée en assemblée générale (AG), permet de faire face à ces incertitudes. Remarquons qu’il s’agit là d’une recommandation du Lefèbvre associatif, la « véritable bible » de la gestion de ces organisations, trop souvent gérées de façon artisanale, par assemblage de bric et de broc… Est-ce de cette façon qu’elles parviendront à leurs objectifs ? N’ont-elles pas droit à la reconnaissance que celle dont jouissent les entreprises aujourd’hui ? Après tout, ces organisations ne contribuent-elles pas, d’une autre façon, au fonctionnement de notre économie ?
Constat
J’ai moi-même été confrontée aux conséquences d’une organisation administrative fragile lors de l’élaboration des budgets d’actions, naviguant sans cesse de dossier en dossier à la recherche de la bonne information. Alors, quand il s’agit d’un ou de quelques dossiers, cela peut se réaliser sans encombre. En revanche, quand il y en a une soixantaine, et que vous devez, pour chacun, tourner et retourner les pages des dossiers, on se laisse très vite inonder sous la « paperasse » et de fait, on perd vite en efficacité et en productivité.
Interrogeons-nous maintenant sur le pourquoi d’un tel « désordre administratif » ? En fait, c’est en réalisant qu’il existait un fort taux de « turn over » de volontaires permanents, de bénévoles et de stagiaires, et malgré toute leur volonté pour s’investir pleinement, que j’ai pu associer défaut de stratégie long terme et manque de structure administrative et organisationnelle solide. En effet, l’organisation administrative est conçue de façon stratifiée, superposant, au fur et à mesure des rotations de personnel en charge de l’administration, les travaux, les résultats et les notes des prédécesseurs, de fait marqués par une méthode et une philosophie révélatrice de la personnalité de chacun. Il n’y a donc pas de réelle stratégie d’action et de développement déployée et suivie sur le long terme. Or, il s’avère que, dans une telle situation, une standardisation des méthodes accompagnée d’une mise en place, manuel à l’appui, de procédures, permettraient de réaliser des gains temporels, humains et financiers considérables ; d’autant que, cet aspect « subvention » est primordial, voire conditionne la survie d’une telle organisation. C’est leur raison d’exister ; leurs ressources principales. Il conviendrait donc d’optimiser la gestion des subventions en milieu associatif notamment en mettant en place des formations et en sensibilisant les différents acteurs au problème du montage des dossiers.
Finalement, la mise en place de procédures, qu’est-ce que cela signifie concrètement ? C’est en fait, aller vers une amélioration de la qualité du traitement de l’information. C’est aussi améliorer la transparence financière de ces structures en passant par la mise en place de standards favorisant la comparaison et la recherche active de compétitivité pour attirer de nouveaux investisseurs, bailleurs de fonds, emprunteurs. Nous pourrions rapprocher ce processus de celui de la transparence des IMF, Instituts de Micro Finance, qui finalement constituent des banques de développement sans but lucratif.
Etant de tempérament plutôt rigoureux, un tel fonctionnement et une telle tenue administrative m’avaient presque « choquée » dès mon arrivée. Cependant, mon intérêt pour le milieu associatif, le milieu du développement et de l’humanitaire m’incita davantage à prendre du recul de façon à mieux comprendre et à analyser ce fonctionnement ; et ce, dans le but d’envisager un moyen, des moyens, une solution, des solutions permanentes pour pallier ce manque de structure.
J’ai donc réfléchi, parallèlement au suivi des dossiers, à un moyen, une application, à la fois conviviale, utile, et sans aucune prétention, qui puisse, à la fois, rendre le traitement, notamment financier, des dossiers de subvention plus homogènes et avoir un regard comparatif facilité sur l’année antérieure de façon à contrôler l’évolution des demande des subventions pour qu’il n’y ait pas de fluctuations trop importante d’une année sur l’autre : en bref, rester logique ! Pour cela, j’ai donc tenté de représenter schématiquement le circuit des informations nécessaires à l’élaboration des dossiers de subventions, mettant ainsi en évidence les différentes interactions entre les données.
2) Suivi budgétaire et financier avec supervision comptable
Les objectifs de la comptabilité associative
La comptabilité est à la fois un besoin interne, en tant qu’instrument de contrôle financier et d’information financière pour ses membres, ses adhérents, les organismes subventioneurs, les collectivités… De plus, pour les associations déclarées munies de la personnalité morale, elle permet de suivre leur patrimoine, véritable gage des créanciers ; de fait, les associations entrent dans le champs d’application de liquidation ou de redressement judiciaire des entreprises.
La comptabilité a pour objet d’enregistrer les opérations économiques effectuées par une personne – physique ou morale – et d’en rendre compte de sorte qu’il soit possible d’en mesurer la richesse en termes, soit statique au travers du Bilan, soit dynamique avec le Compte de Résultat. Aussi, pour comprendre les comptes d’une association, est-il indispensable de suivre une démarche cohérente qui comporte les étapes suivantes :
_ La détermination des opérations économiques
_ La définition des contraintes juridiques pesant sur ces mêmes opérations (assujettissement à la TVA
par exemple)
_ La connaissance des états financiers et des règles de leur élaboration pour comprendre la situation de l’activité ou de la personne les produisant.
Ce phénomène traduit un légitime souci de comprendre les comptes tels qu’ils sont établis et diffusés en application de l’ensemble des règles en vigueur, lesquelles règles sont souvent fort obscures pour des personnes non spécialistes de ces questions. Or il en est de la comptabilité comme de toute autre matière technique : sa complexité pour le profane est plus apparente que réelle et provient, pour une large part, de la méconnaissance de sa logique et de son objet.
Le caractère professionnel de la gestion
Sans but lucratif, elles ne recherchent donc pas le profit ; c’est donc à juste titre, qu’il est généralement fait appel dans les associations, et c’est là une de leur composante essentielle, à la bonne volonté. Le bon fonctionnement d’une entreprise, pourtant, suppose plus : le professionnalisme est de rigueur, et, force est de constater que des situations financières difficiles d’associations trouvent souvent leur raison dans la « bonne volonté » - donc dans le manque de professionnalisme des bénévoles. Qu’en déduire ? Qu’il faudrait plus de professionnels et moins de bénévoles ? Nous nous attacherons à répondre à cette question lorsque nous aborderons le chapitre relatif à la gestion du personnel.
De plus, détachée de son rôle d’intérêt public, il faut souligner que la gestion, tout comme le management et la comptabilité, fait appel à des notions bien spécifiques nécessitant des connaissances pointues et où la rigueur est coutume. De fait, on voit mal comment des personnes sans un minimum de formation en la matière puissent être amenées à gérer avec efficacité ces énormes structures, qui finalement pourraient s’assimiler facilement à des entreprises classiques.
Aussi, si l’on considère à la fois cet aspect technique voire professionnel, et leur rôle social, on ne peut que constater leurs liens étroits. Par là même, comment peut-on alors concevoir l’efficacité réelle d’une association sans une masse salariale suffisante aux postes de gestion et de management ?
Notons aussi le fait que, dans une association, l’argent n’est pas source de pouvoir : c’est l’illustration de la règle, en assemblée générale des sociétaires, « une voix pour un homme ». En l’absence d’une direction forte capable d’orienter les discussions pour parvenir à des décisions concrètes, le risque existe d’une insuffisance de décisions en temps utile.
Par ailleurs, au-delà de la prise de décisions adaptées aux circonstances de l’association, il est nécessaire qu’elles soient :
_ Claires, détaillées et complètes, au moins pour ce qui concerne le projet associatif : si une décision est prise d’exercer telle activité, encore faut-il en préciser les circonstances et limites ainsi que les moyens – finances comprises – mobilisés.
_ Appliquées effectivement et efficacement ce qui suppose une bonne organisation et un bon fonctionnement des services.
D’ailleurs, à ce titre, l’organigramme des tâches et des fonctions comme des modalités de collaboration des employés et bénévoles constitue un bon indicateur. En effet, il peut arriver que la situation financière difficile d’une association trouve, pour une large part, son origine et sa cause dans l’absence de direction réelle ou bien dans un mode d’organisation et de fonctionnement insuffisant. Aussi, la pratique d’analyses financières des associations, entre autre, permet d’opérer une claire distinction entre celles gérées de façon professionnelle et les autres. Du reste, lorsque l’on évoque l’analyse financière et comptable des associations, il est souvent question d’aller vers une meilleure transparence des finances locales, qu’il s’agisse des collectivités territoriales ou des entreprises qui y sont liées ou bien d’audit ou d’analyse financière de collectivités territoriales ou des entreprises en dépendant.
3) Le contrôle de gestion
Constat
Trop souvent, le volet financier des dossiers de subvention est négligé et fait « à la va-vite ». Pourtant, il en demeure bien l’un des pivots incontournables qui permet à l’organisme d’évaluer le bien fondé du ou des projets et actions. Aussi, les problèmes de mise en œuvre et d’évaluation budgétaire, aussi bien prévisionnelle que bilancielle, sont fréquents et nuisent au développement qualitatif et argumentatif. Il en résulte souvent des difficultés à se projeter, à projeter ses activités dans le futur (en termes financiers et aussi de réalisation).
Pourtant, concevoir un budget n’est pas une tâche difficile en soi. En revanche, la difficulté réside dans la valeur de l’information source.
Par essence, le prévisionnel est aléatoire. De fait, il doit reposer sur des données fiables et rigoureuse, au lieu d’une évaluation qui se voudrait hasardeuse et par conséquent peu réaliste. Or, ce qui fait la fiabilité de données est bien souvent leur caractère logique et arithmétique. En conséquences, il faudrait pouvoir imaginer, concevoir un système, une architecture type permettant de comparer les budgets annuels par actions, activités, domaines, ministères et autres… afin de faciliter leur élaboration. Ainsi, cela favoriserait l’application de tendances et rapports mathématiques et cartésiens aux mécanismes budgétaires et de gestion.
En ce qui concerne la réalisation des bilans financiers des actions réalisées, la qualité de l’information dépend quant à elle de la qualité du système de gestion et d’information. C’est en effet la circulation des données réelles depuis le cœur de l’action au centre gestionnaire qui sanctionnera la fiabilité de l’information : rapidité, réactivité, disponibilité tels sont les maîtres mots de la performance d’un système d’information.
Cependant, l’existence d’un système de gestion et d’information ainsi qu’une bonne transmission des données ne sont pas pour autant suffisants. Il faut en effet une force d’analyse capable de gérer à bon escient l’arrivée en masse d’information, de réclamations, les contacts avec les entités…
Comment : Moyens, les outils pensés
La comptabilité représente le cœur du système dont la performance demeure intrinsèquement liée aux potentialités des logiciels employés. Afin de mesurer les possibilités de telle organisation il conviendrait avant tout de définir le ou les objectif(s) de l’outil informatique. Par définition, le logiciel permet l’automatisation, l’accélération et la suppression d’un ensemble de manipulations humaines (reprises, reporting manuels…) trop souvent source d’erreurs. La machine, conçue par l’homme en tant que tête pensante, devient alors support technique, tandis que l’homme, l’être physique, se convertit en analyste des données du système informationnel. Il existe à ce titre une multitude d’ERP sur le marché.
Cependant, bien souvent, nombres de fonctionnalités ne sont pas exploitées. Or, compte tenu de l’investissement initial et du retour sur investissement qu’il procure, il en est pourtant regrettable. Aussi, considérant ces aspects techniques du logiciel, on perçoit bien toute l’importance d’une architecture informatique personnalisée permettant l’élaboration de tableaux de bords et de reporting de données cohérents et ergonomiques au regard de la structure associative. De fait, cela favorisera et rendra d’autant plus efficace leur suivi et leur analyse.
Pour cela, compte tenu de la complexité et de la diversité du service administratif et financier en milieu associatif, pourquoi ne pas scinder la fonction de direction administrative et financière en deux fonctions distinctes dont les rôles seraient définis comme suit :
- D’une part, une Direction Administrative qui serait un relais externe, ayant à charge l’ensemble de la gestion des subventions, depuis la recherche de financement, en passant par le suivi des conventions de subventions, de façon à veiller, d’année en année, au maintien du niveau des sommes allouées par les différents organismes.
- D’autre part, une Direction Financière dont le rôle serait d’évaluer la performance interne de l’association. En l’occurrence, il veillera à la bonne circulation de l’information (notamment financière) et à l’efficacité du système de gestion et d’information. Ses compétences relèveraient davantage de celles d’un contrôleur de gestion.
Une des principales particularités du fonctionnement associatif réside dans la composition même du personnel qui y travaille. Des salariés et des bénévoles se côtoient pour œuvrer ensemble pour une même et « juste » cause.
« Selon l’INSEE, en 1996, les associations de solidarité internationale françaises employaient environ 2 000 salariés à temps plein et près de 43 000 bénévoles, soit une proportion de 1 à 20. Au niveau européen, ces derniers représentaient 91% des effectifs au milieu des années 90. Ainsi la galaxie Greenpeace compte environ 10 000 volontaires pour 1 400 salariés (soit un rapport de 7 volontaires par salarié). Bref, les ONG trouvent là une main d’œuvre abondante et dont le coût défi toute concurrence. Ces volontaires perçoivent certes des indemnités, notamment les expatriés (mais pas seulement), mais restent beaucoup plus protéger que le salariat classique. »
Les Multinationales du cœur – Thierry Pech et Marc-Olivier Padis
La république des idées, édition du Seuil - 2004
Pourtant, aujourd’hui, au-delà de la simple économie liée au statut de volontaire plutôt que celui de salarié, « l’engagement humanitaire n’est plus seulement militant, mais également professionnel. » déclarait Aude de Calan, chargée de recrutement chez Ibid. D’ailleurs, « chez Médecins du Monde, ce sont souvent des professionnels sans expérience associative qui dirigent désormais les services ressources humaines, gestion financière ou communication. »
Les acteurs associatifs à travers l’exemple d’ATD
1-Les volontaires
- Les Volontaires permanents : Personnes ou couples salariés du Mouvement ATD qui ont accepté de se consacrer entièrement au soutien des familles très démunies dans leur lutte contre la misère et qui ont choisi de vivre proche de celles-ci. Ils sont actuellement quelques 350 hommes et femmes, célibataires ou couples, de différentes nationalités, origines, professions, religions ou philosophies, et présents dans 23 pays. Ils travaillent en équipe et sont disponibles pour aller là où le Mouvement a besoin d’eux. Ils établissent entre eux un partage des salaires et reçoivent une indemnité identique. Ils sont une soixantaine à être directement impliqués dans l’action du Mouvement en France.
A lire une telle définition, constat simple est de noter le poids des mots notamment en ce qui concerne l’engagement même en tant que volontaire. Il semble en effet que le Père Joseph (fondateur du Mouvement ATD Quart Monde) ait accordé beaucoup d’importance à cette démarche d’engagement durable et à la motivation pour participer activement à l’action du Mouvement, plus que sur cet aspect de qualification. A aucun moment d’ailleurs, tout au long de cette définition, il n’est fait allusion à cela. Il est pourtant vrai que toute la force du Mouvement ATD Quart Monde tient en partie au nombre de volontaires désireux de s’impliquer dans la vie du Mouvement ; cependant, telle force n’est pas suffisante. Il faut aussi une performance logistique et administrative qui puisse soutenir et renforcer l’action de terrain.
Si les principes du fondateur sont tout à fait louables et pleins de bon sens, considérant alors que la bonne volonté et la motivation sont sources de réussite et d’efficacité, dans la réalité, il manque toutefois cet aspect, on ne peut plus important, qu’est l’adéquation entre le poste occupé et le profil professionnel du salarié. En effet, si l’on s’en retourne à la chaîne de valeur évoquée précédemment, il faut garder à l’esprit cette coexistence de ces deux types d’activités : les activités principales d’action et les activités de fonctionnement. Pourtant, il semble que, selon la définition du Père Joseph, il ne soit fait à aucun moment une distinction entre ces deux types de postes.
- Expatriés et Volontaires, guerre d’idéologie ?
- Les volontaires coûtent moins cher, ceci n’a jamais été un secret pour quiconque. En effet, payés selon la tarification locale du pays, ils agissent plus par motivation humaine, par compréhension des inégalités de notre société, que par motivations pécuniaires. Envoyés en mission humanitaire et/ou de développement par les ONG dont ils dépendent, ils n’ont pas toujours de qualification spécifique ; en effet, le recrutement des volontaires ne s’établit pas encore selon une grille de compétences prédéfinie.
- Les expatriés, quant à eux, sont employés par l’état de leur pays de résidence d’origine : ils perçoivent donc une rémunération fonction de leur qualification et poste d’affectation et non du niveau de vie locale.
Les volontaires représentent de fait une main d’œuvre bon marché pour les ONG, et ATD, en l’occurrence, aurait tort de s’en priver. Cependant, si la rémunération des volontaires demeure si faible, reste à se poser la question du pourquoi ? En fait, deux raisons peuvent possiblement être avancées : le partage équitable des salaires et une qualification précise souvent non requise ; le « terrain » et la motivation étant les critères principaux d’embauche du fait de la faible attractivité du secteur de l’humanitaire et du développement auprès des jeunes diplômés (faible rémunération oblige !). Afin d’exprimer ce manque d’engouement de la part des jeunes (et moins jeunes) professionnels, Philippe Chabasse, Président d’Handicap International, soulignait qu’« il y a 20 ans lors de notre création (de Handicap International) tout le monde recevait le même salaire. Puis, au bout de 5 ans, nous avons été obligés d’introduire une échelle de 1 à 2 pour résoudre, déjà, nos problèmes de recrutement. Aujourd’hui, elle est de 1 à 3,5 et nous avons encore du mal à embaucher des financiers et des informaticiens. » Ceci montre bien qu’il existe réellement un potentiel d’activité et d’emploi à ce niveau là.
- La gestion du volontariat
L’association Equipes Science et Service a en charge cet aspect. En lien avec des volontaires de chaque pays, un groupe de volontaires constitué en Conseil d’administration élabore une politique de ressources humaines « volontariat ». L’accord de fond est vérifié au cours des Assises du volontariat ATD Quart Monde. Le paiement d’indemnités mensuelles est effectué selon un barème.
2-Les salariés
Le Mouvement ATD a créé une association indépendante et entièrement autonome, l’association MICARD, dont l’objet est exclusivement la gestion du personnel salarié occupant des postes qualifiés. Actuellement, une trentaine de salariés est employée par l’association Micard occupant des postes stratégiques de fonctionnement (la comptabilité par exemple).
3-Les bénévoles (environ 4 000)
- Les Alliés : Bénévoles qui ne sont pas issus « de la misère ». Ils sont appelés ainsi dans le Mouvement car leur action dépasse largement le stade de l’aide. Ce sont des personnes qui s’investissent complètement dans le Mouvement, pas uniquement sur le plan du temps disponible mais plus sur le plan d’un véritable engagement.
Ce sont des personnes qui suivent le Mouvement de très près dont certains travaillent à temps plein pour le Mouvement ATD Quart Monde.
Ils s’engagent en tant qu’alliés des plus pauvres à qui ils transmettent courage et aspirations dans leurs propres milieux. Par leurs actions bénévoles, ils participent à l’action du Mouvement et tentent de faire changer le regard que la société porte sur les plus démunis.
Les alliés sont pour la plupart des retraités, qualifiés ou non. A ce sujet, peut-on parler de compétences exploitables ? Le problème des retraités, si l’on peut parler ainsi, est un long sujet de débat en milieu associatif : il conviendrait d’abord de prendre en considération leur statut, à l’heure de leur retraite, dans la société. En effet, souvent les retraités sont des personnes harassées par leur vie de labeur et désireuses de s’investir et d’investir de leur temps pour telle juste cause, sans pour autant être prêts à consacrer 100% de leur énergie (sans toutefois remettre en cause quelconque forme d’engagement de leur part), ce qui demeure tout a fait compréhensible. Il ne faut donc pas attendre autant d’un bénévole que d’un volontaire ou bien d’un salarié. De fait, il serait contradictoire que ces personnes soient affectées à des postes de gestion de l’organisation
- Les Militants Quart Monde : Ils sont issus de milieux défavorisés : le Quart Monde. Ils sont les premiers à refuser la misère dans leur quotidien. Certains sont donc devenus membres actifs du Mouvement car ils s’y reconnaissent. Ces bénévoles s’engagent, militent avec ATD en participant à certaines actions du Mouvement pour voir évoluer les choses, pour changer leur vie et celles de leurs enfants.
Quelques ratios d’analyse du personnel associatif
Cependant, cette description des composantes du personnel associatif réalisée à travers l’exemple du Mouvement ATD Quart Monde ne permet pas, en l’état, de tirer de suffisantes conclusions quant à la gestion du personnel associatif. A ce titre, l’étude de ratios entre salariés (administratif), bénévoles et volontaires suivant le modèle de l’INSEE, permettrait de vérifier la cohérence ou non de la gestion du personnel avec la chaîne de valeur précédemment abordée.
- Chez ATD, le rapport Salariés/Bénévoles s’établit à 1 salarié pour 133 bénévoles. On est encore loin du rapport de 1à 20 calculé par l’INSEE en 1996 auprès des OSI. Le Mouvement ATD Quart Monde France connaît un engagement bénévole 6 fois et demi plus de important que la moyenne des organisations de solidarités internationales. Ce rapport en lui-même ne fait pas pour autant défaut au Mouvement ATD, puisqu’il montre l’intérêt que son action suscite auprès de la population. En revanche, si l’engagement bénévole se révèle important, une telle part de bénévolat pourrait souligner un défaut de gestion interne dans la mesure où il est employé au détriment du salariat, sans tenir compte des compétences nécessaires, et en s’appuyant plus sur l’engagement et la bonne volonté.
- Le Rapport Volontaires/Bénévoles s’établit à 1 volontaire pour 11 bénévoles. Ce dernier ratio renforce l’analyse précédente selon laquelle le bénévolat est utilisé en remplaçant du volontariat et du salariat, et ce, par gain de financier. Cependant, il faut souligner que, certes, toute économie est bonne à prendre, mais seulement si elle rime avec efficacité, performance et amélioration. Ainsi, il est vrai que l’emploi bénévole dans le milieu associatif est un soutien indispensable, mais, et c’est ce que bien souvent les associations se refusent à admettre, l’action bénévole, en raison de sa caractéristique principale basée sur la solidarité et l’entraide ou bien ce que l’on appelle communément le « coup de main », n’a pas idéalement les mêmes résultats que ceux réalisés par des volontaires ; motivations pécuniaires obligent.
- Le Rapport Salariés/Volontaires du Mouvement ATD Quart Monde France s’établit à 1 salarié pour 11 volontaires contre 1 pour 7 pour Greenpeace alors que cette dernière est d’envergure nettement supérieure.
Composition des charges de personnel
On notera que la répartition Salariés / Volontaires chez ATD Quart Monde va à l’encontre de la répartition des charges ce qui n’est pas sans poser problème quant à l’affectation des postes salariés. En effet, alors que précédemment nous avions montré que 20% des charges représentaient 80% de leurs valeurs globales, et que celles-ci n’étaient autre que les charges de fonctionnement, une telle répartition des charges de personnel suppose et implique inévitablement l’affectation de volontaires à des postes pivots pour l’association. Enfin, ce dernier constat ne reste pas sans soulever la question de la politique et la gestion du personnel en milieu associatif : Comment, qui recruter, et à quels postes ?
A TOUTE DETRESSE a été crée en 1971 par le Père Joseph WRESINSKI , dans le but d’assurer la pérennité et la gestion des biens du Mouvement au service des intérêts des plus pauvres en garantissant que ‘’tout don, legs ou donation soit toujours réservé aux plus démunis’’ :
La FONDATION AIDE
« … Je sais que vous comprenez l’importance de ce à quoi je vise. J’ai toujours été frappé des investissements financiers et humains qui ont été à l’origine de mouvements destinés à la promotion des pauvres et souvent des plus pauvres. Avec le temps, les initiateurs et les premiers collaborateurs ayant disparu, les institutions ou les associations se sont souvent orientées vers des activités dont les bénéficiaires n’étaient plus les plus démunis. C’est cela que je veux absolument éviter. Je veux que les sous-prolétaires ne soient pas dépossédés de ce que tant de mes amis on fait ou m’ont permis de faire.
Dans ce but, j’ai créé des équipes d’hommes et de femmes capables de vouer leur vie au Quart Monde. J’ai voulu aussi que les biens de celui-ci, confiés à l’association, ne puissent jamais être détournés des plus démunis… »
Père Joseph Wresinski (juillet 1970)
Elle est animée et dirigée par un groupe de personnes bénévoles dont la contribution a été sollicitée soit parce que leur engagement avec les très pauvres constitue un projet de vie, soit parce qu’elles ont des compétences professionnelles reconnues dans les domaines administratif, juridique et financier, soit pour les deux raisons à la fois. Elle est reconnue d’utilité publique et, à ce titre, est soumise au contrôle de l’administration tant en ce qui concerne l’acceptation et l’affectation des donations et des legs que la surveillance de sa gestion.
La Fondation
est adhérente au Comité de la Charte
de déontologie des organisations sociales et humanitaires faisant appel à la générosité du public.
Le Conseil d’Administration arrête les grands axes d’une politique pour le soutien aux associations et les grands travaux. Le Bureau est l’interlocuteur des commissions mises en place pour des grands travaux ou des nouveaux projets sur tel ou tel site. Concernant le soutien aux associations, le reversement de dons affectés a le caractère d’automaticité. Aussi, le Mouvement ATD Quart Monde bénéficie d’un soutien au fonctionnement ayant actuellement le caractère de subvention d’équilibre.